Conférence à l'alliance franco-Comorienne

Dans le cadre du cycle des conférences organisé par l'université des Comores en partenariat avec le service de coopération et d'action culturelle de l'ambasade de France, l'institut de recherche pour le développement et l'alliance franco-comorienne, une conférence sur l'organisation de la société Comorienne a été animée ce  jeudi 15 novembre 2012 à l'alliance franco-comorienne par Sophie Blanchy, spécialiste des questions sociétales aux Comores. Le thème de la conférence s'articulait autour de deux points importants: matrilinéarité d'une  société hiérarchisée et anthropologie du grand mariage à la Grande-Comore.

Après une présentation succincte sur l'organisation de la société à la Grande-Comore, la conférencière s'est étalée sur le système de filiation qui s'imbrique le plus souvent avec le grand mariage. En analysant la pensée de  la conférencière, le grand  mariage est dans l'imaginaire collectif l'essence même de l'existence de tout grand comorien. Tout le monde aspire un jour à accomplir son devoir sociétal avec bien sûre le concours, de la cellule familiale (daho), de sa classe d'âge (beya) et  de la cité (mdji).Le grand mariage est en fait une affaire de toute la cité.

Elle a fait une remarque pertinente qui'il y a à nos jours un retour en force des pratiques liées au grand mariage au niveau des différentes couches sociales sans livrer à son auditoire des explications sur ce phénomène. Elle a également présenté avec une certaine dextérité très pointue les liens de fonctionnalité existant  entre parenté, grand mariage et existence sociétale dans un contexte  où matrilinéarité va de pair avec une société foncièrement musulmane. Il nous semblerait  d'ailleurs que c'est le seul pays musulman au monde où la filiation matrilinéaire coexiste avec le modèle de filiation musulmane.

Au-delà de sa brillante présentation, la conférencière n'a pas abordé le  sujet  sous un oeil critique. On aurait souhaité qu'elle ait présenté à son auditoire un regard critique de  l'institution du grand mariage. En d'autres termes, en tant que chercheur et étranger des pratiques inhérentes au grand mariage, quel jugement porte-t-elle sur cette institution? Elle a  certes souligné dans sa présentation que c'est un système ayant fasciné ses collaborateurs chercheurs, mais elle a omis de souligner que cette institution  entraîne  certaines personnes  à se ruiner tout en le sachant d'avance. L'essentiel pour le grand comorien est d'être une personne comblée. Pour la  cellule familiale, leur enfant n'a pas été l'ooprobre de la famille.Il est donc une personne parvenue qui peut se permettre de parler sur la place publique avec une certaine largesse étant donnée que dans sa lignée matrilinéaire ses oncles ont fait le grand mariage d'une manière emphatique et boursouflée. Il est certes vrai que "la société de Nagzidja est un modèle rare qui intéresse les sciences sociales", mais comment peut -on comprendre que dans un pays moins avancé tel que les Comores,  la préoccupation de la population est de faire un jour  un mariage comme un prince au nom de la coutume? On ne peut pas monologuer sur cette question maintenant, d'autres occasions se présenteraient pour en parler en long et en large.

A la fin de la conférence Sophie Blanchy a présenté avec un sens aigu et parfois moqueur, me semble-t-il, que les belles maisons appartenant aux "je-viens" sont construites à partir de l'argent de la France. Il y a nuance madame entre l'argent du contribuable français dont une partie est destinée à l'aide publique au développement dans les pays en développement, et l'argent des travailleurs immigrés qui l'ont gagné avec labeur.  Dans le premier cas de figure, c'est de l'argent qui entre dans le cadre de la coopération bilatérale entre deux pays, la France et les Comores. Quant au deuxième cas de figure, l'argent des immigrés comoriens ne doit pas être assimilé à l'argent de la France. Je sais que vous connaissez parfaitement cette nuance,  mais ne voudriez vous pas se moquer  de ces immigrés?

A.B.